On parle de quoi par art moderne/art contemporain?
Et oui, tout est discutable dans le merveilleux monde de l’art surtout lorsqu’on parle de genre et de catégorie. Mais ces distinctions sont à faire, sinon tout est sur le même pied. Il faut tout d’abord souligner que l’art est une question de rupture : une rupture avec ce qui a été produit avant. C’est normal qui dit création, dit produire quelque chose de nouveau, donc qui n’existait pas.
Art moderne en rupture avec quoi? La première grande rupture est sans doute avec l’art classique, son académisme comportant des règles très strictes en matière de matériaux et dans les manières de faire pour rendre compte du réel. Le portrait, le paysage, la nature morte et les scènes célébrants les réalisations des mécènes sont des thèmes privilégiés.
Cette rupture se manifeste comment? Par une plus grande quête de spécificité de la part des artistes, accompagné d’une volonté de faire autrement et de représenter différemment leur environnement. Ce qui a amené les artistes à questionner les fondements de l’art et de la représentation. L’art moderne est donc un art qui réfléchit, sur sa propre définition, sur ses buts et sa spécificité. Avec la venue de l’abstraction, l’art est devenu plus hermétique en éliminant les références au réel, à ce qui est vu. La création repose plus sur l’expression de l’intériorité de l’artiste dans toute la subjectivité qu’elle impose. Il ne faut pas oublier que l’origine de cette rupture est due en grande partie à l’arrivée de la photographie. Seuls les matériaux ont résisté à cette vague de changement.
Pour l’art contemporain, pouvons-nous dire tout simplement qu’il est le produit des artistes vivant d’aujourd’hui (nos contemporains) sans aucune autre valeur ajoutée? C’est en partie vrai, mais ce n’est pas qu’une simple question d’époque. Ainsi, les premières manifestations de l’art contemporain sont apparues à la fin des années 1950, pour foisonner au cours des années 1960-70 dans différents courants se réclamant d’avant-garde par des œuvres conceptuelles, minimalistes, corporelles et bien d’autres. L’art contemporain s’est imposé dans les années 1980, venant supplanter l’art moderne prédominant depuis la fin du XIXe siècle. L’expression art contemporain s’est également imposé au détriment d’autres appellations telles qu’art actuel, art vivant, etc.
La rupture de l’art contemporain par rapport à l’art moderne se perçoit dans l’éclatement des frontières disciplinaires tant au plan des matériaux et des techniques explorées qu’au plan du champ artistique du visuel. En fait, le visuel s’inscrit dans un cadre beaucoup plus large et forcément beaucoup plus complexe. Le peintre fait plus que de la peinture, le sculpteur fait plus que de la sculpture et le performeur plus que de la performance, tout ce qui peut être fait entre ça est rendu possible. De plus, d’autres disciplines sont venues enrichir la pratique de l’artiste. La rupture a eu pour effet de libérer la création en se permettant d’aller puiser sans gêne dans l’histoire de l’art ancienne et moderne pour rendre compte de thématiques d’aujourd’hui. Le retour à la narration, à l’ornement et à la figuration redevient possible. Ainsi des rapports nouveaux s’établissent entre l’œuvre et l’artiste et celui avec le public. L’œuvre proposée devient un objet de médiation, elle autorise et même oblige une plus grande participation du regardeur dans l’interprétation.
L’art contemporain ne donne pas de réponse, il interroge et questionne notre rapport au monde. Une chose est certaine, il est difficile de nommer ce qui est en train de se faire en art visuel : tout est ouvert, imprévisible !